TRAJECTOIRES MUSICALES : DES FEMMES D’EXCEPTION

Depuis plusieurs années déjà, la contralto Marie-Nicole Lemieux brille de tous les feux sur les plus grandes scènes du monde. Elle sera de passage à la Maison symphonique du 17 au 19 décembre prochains, lors du concert Les grandes voix du Québec chantent Noël.
Marie-Nicole Lemieux nait à Dolbeau en 1975 dans une famille où il fait bon chanter : « J’ai toujours vu mes parents chanter en duo, […] le chant est associé au bonheur familial. Pour moi, une maison où ça ne chante pas, je ne peux pas imaginer ça. » Ça écoute et chante du Nana Mouskouri, du Claude François, du Michel Fugain, mais aussi, de la musique classique. Son père aime particulièrement les ténors comme Richard Verreau ou Raoul Jobin et un beau jour, il rentre du travail avec un 33 tours qui va changer la vie de Marie-Nicole.
Elle s’en souvient encore : « Ça, c’est toute qu’un ténor », dit son père en tenant à la main un disque de Luciano Pavarotti. La fugue du « Sanctus » issu du Requiem de Fauré séduit particulièrement une Marie-Nicole de dix ans qui se dit : « on est comme au paradis. » De cet enregistrement naît le goût, la passion et la curiosité pour la musique classique chez celle qui deviendra l’une des plus grands contraltos de la planète.
Adolescente, Marie-Nicole aurait voulu jouer du piano; plus encore du violoncelle. Mais ces instruments ne lui sont pas accessibles. Elle choisit donc la flûte traversière dans l’harmonie de l’école avant de délaisser la musique pour les sciences à l’âge de 17 ans. « Et je vous jure, c’est comme si j’avais arrêté de respirer », confie-t-elle. Convaincue au plus profond de son être, elle retourne donc vers la musique, au conservatoire de Chicoutimi, où son talent unique est rapidement constaté.
Chante Geistliches Wiegenlied de Brahms
L’arrivée du nouveau millénaire sourit grandement à Marie-Nicole Lemieux, qui, fonceuse et déterminée, enchaîne victoire sur victoire lors de plusieurs concours. C’est toutefois son triomphe au concours Reine Élisabeth de Bruxelles – l’un des plus prestigieux de la planète – qui constituera son plus bel accomplissement de l’époque, lui ouvrant les portes du continent européen.
Marie-Nicole Lemieux interprète d’abord des mélodies et des lieder, sans se douter de la polyvalence qui sommeille en elle. Luc Beauséjour est celui qui la convainc de son talent en musique baroque et c’est à Toronto que lui est offert son premier rôle d’opéra : Cornelia, dans Giulio Cesare de Handel. En 2003, on lui offre un rôle dans l’Orlando furioso de Vivaldi, au Théâtre des Champs-Élysées. Sur scène, la peur dévore ses entrailles, avouera-t-elle plus tard en entrevue. Elle chante pourtant avec ses trippes et s’ensuit la consécration parisienne. Chaque prise de rôle important a d’ailleurs continué de terroriser Marie-Nicole Lemieux, qui a toujours su surmonter ses peurs.
Avec un peu de recul, Marie-Nicole songe aux rôles qui l’ont le plus marquée. Elle pense à Cassandre dans Les Troyens de Berlioz – « Ça m’a pris 20 ans de travail vocal pour arriver à ça » –, à son premier Carmen de Bizet aux Champs-Élysées en 2017, ou encore à Miss Quickly dans Falstaff de Verdi, à Franckfort en 2003. Son parcours l’a également amenée à développer une relation toute spéciale avec Kent Nagano et l’Orchestre symphonique de Montréal. Lors des dernières saisons, sa voix a resplendi notamment dans le Requiem de Verdi, la Symphonie « Des mille » de Mahler, la Messe en si mineur de Bach et tout récemment dans les Wesendonck Lieder de Wagner, en tournée européenne avec l’OSM.
Chante Falstaff de Verdi
On ne dit plus de sa voix que c’en est une de contralto. On dit plutôt que c’est la voix de Marie-Nicole Lemieux. Car celle-ci aura réussi à transcender les limites du registre habituel de « contralto » et à faire résonner sa voix au-delà des conventions. Venez voir à l’œuvre ce fleuron québécois lors des concerts Les grandes voix du Québec chantent Noël, du 17 au 19 décembre à la Maison symphonique.